Ce que nous retenons du printemps dernier


Enseignante au secondaire
12 mars 2020 :
Plus la journée avance, plus la rumeur court parmi les élèves et les enseignants : l’école serait possiblement fermée le lendemain. Je corrige des tests dans le salon du personnel et j’entends l’une de mes collègues au téléphone annulant le voyage qu’elle avait déjà tout planifié. Je fais ma dernière période dans une ambiance complètement normale : personne ne se doutait de l’ampleur que la crise allait prendre. Je dis «au revoir» aux élèves, un «au revoir» que je trouve aujourd’hui trop banal puisque nous ne sommes jamais retournés en classe.
Période «vacances», trousses ministérielles, enseignement à distance et fin d’année non-traditionnelle, ce printemps d’incertitudes, de nouveautés, de changements et d’imprévisibilité nous a donné beaucoup à apprendre et beaucoup à retenir.
La capacité d’adaptation des enseignants…
Si notre capacité de nous adapter est une qualité essentielle chez tout enseignant, elle a été mise à rude épreuve au printemps dernier. Transposition de cours en format numérique, captation vidéo, montage, adaptation de matériel, formations, nouveaux outils technologiques, nouvelles plateformes, gestion des classes à distance, nous avons su tenir bon et tenter de transmettre les savoirs essentiels de la meilleure façon à nos élèves. Je crois fortement que c’est le moment de nous donner cette petite tape dans le dos qui fait tant de bien : nous avons réussi à nous «retourner sur un dix cennes», à garder le contact avec nos élèves et nous avons donné le meilleur de nous-mêmes à travers tout cela, nous pouvons en être très fiers!
…mais surtout : la capacité d’adaptation des élèves
Je crois qu’il faut souligner la capacité d’adaptation de nos jeunes également. Ils ont dû s’adapter à la réalité de la pandémie, du confinement et des règles strictes à suivre. Plusieurs élèves ont témoigné avoir passé le temps en essayant de nouvelles activités (cuisine, dessin, peinture, etc.) ou avoir entrepris de bouger plus (longues marches en famille, course, vélo, etc.) J’en profite pour souligner l’excellente initiative du Grand défi Pierre Lavoie qui a lancé plusieurs applications visant à faire bouger petits et grands lors de la pandémie.
Sur le plan scolaire et technologique, on dit souvent des jeunes de cette génération qu’ils sont nés dans la technologie, mais pour certains, ce n’était pas si facile. Pourtant, ils ont eux aussi su s’adapter à cette nouvelle réalité qu’a été l’enseignement à distance avec l’aide de leurs parents (qui ont, pour beaucoup, ajouté une corde à leur arc déjà bien garni : faire l’école à la maison), de leurs frères et sœurs et de leurs enseignants. Ils se sont également adaptés aux informations changeantes et parfois contradictoires qu’ils ont reçues. Il a d’abord été dit qu’ils pouvaient voir la fermeture des écoles comme des vacances, pour ensuite se faire suggérer de continuer à faire des travaux scolaires tels que les trousses ministérielles, pour ensuite apprendre que leurs cours allaient reprendre en ligne. Malgré tout, leur présence et leur participation aux activités proposées peuvent être soulignées.
Par contre, rien ne remplace l’expérience réelle
Si je trouve important de retenir la capacité d’adaptation des enseignants et des jeunes, par contre, je retiens aussi que l’expérience réelle d’être à l’école, d’observer les jeunes, de donner et de recevoir de la rétroaction, de vérifier adéquatement la compréhension des élèves et beaucoup de ces autres actions du quotidien sont difficilement remplaçables, même par l’enseignement à distance. En effet, si la réponse a été majoritairement positive dans mon cas, j’ai malheureusement l’impression que ce mode d’apprentissage ne convenait pas à tous les élèves, notamment à ceux qui étaient en grande difficulté. J’en ai vu quelques-uns baisser les bras. J’ai aussi vu des jeunes qui avaient besoin d’un accompagnement, d’un enseignement plus soutenu, être davantage laissés à eux-mêmes dans tout cela. Le maintien du lien, de la communication, l’art d’aller «chercher» les élèves s’est avéré plus difficile derrière l’écran d’ordinateur ou derrière le téléphone.
L’impact du confinement sur la vie sociale des jeunes
Alors que nous en connaissons peu sur les effets psychologiques de la COVID et du confinement du printemps, il est certain que pour les jeunes comme pour les adultes, cette période n’a pas toujours été facile. Pour les enfants et les adolescents notamment, la fermeture des écoles a certainement affecté grandement leur vie. En effet, malgré nos efforts de faire les cours les plus captivants qui soient, pour beaucoup de jeunes, l’école est avant tout le cœur de leur vie sociale. C’est au sein de ces différents groupes d’amis ou de connaissances qu’ils construisent leur personnalité et leur identité, qu’ils en découvrent davantage sur eux-mêmes et sur le monde. Quels effets aura eu le confinement sur ces jeunes? Que restera-t-il du passage de la COVID dans leur vie? À quoi ressembleront cette nouvelle année scolaire et les retrouvailles tant attendues avec leurs pairs?