Toi pis le droit d’auteur


Enseignante au primaire et conseillère pédagogique
Dans le milieu de l’enseignement, on va se le dire, ultimement c’est une large proportion d’entre nous qui sommes payés par la même poche, celle des contribuables. Dans cette optique, j’ai toujours encouragé le partage et l’échange de nos ressources. Trois personnes, trois personnes généreuses de mon entourage ont vécu la même chose que moi en quelques semaines. Et comme préambule, j’ai le goût de vous dire que les constats que je fais aujourd’hui ne m’empêcheront jamais de collaborer ou de partager, mais le goût est amer un peu.
Contexte 1:
J’ai une amie qui assiste à un congrès en ligne. On lui présente un outil techno cool pour aller avec un thème qu’elle travaille déjà avec des collègues et des élèves. Elle s’inscrit à la présentation pour réaliser que le projet présenté est le sien à la différence près que la tâche finale du projet est différente (dorénavant techno) et que son nom n’est pas mentionné durant toute la présentation et qu’elle n’en a jamais été informée.
Contexte 2:
Je ris un soir avec des amies et on s’amuse à Googler nos noms. Je me rends compte que mon matériel pédagogique, partagé largement dans la communauté des enseignants, est publié sur un site payant sans que j’en sois informée. Personne ne fait de l’argent avec le matériel pour le moment, mais il y est… et je ne suis pas au courant. Plusieurs démarches plus tard, le matériel est retiré de la plateforme, l’enseignante s’excuse, on lui avait appris dans un cours universitaire à mettre son matériel sur cette plateforme.
Contexte 3:
Je jase avec une autre amie, elle est maintenant conseillère pédagogique, elle va visiter une enseignante en classe qui lui présente fièrement le projet qu’elle compte faire avec ses élèves. La conseillère pédagogique reconnaît son propre matériel sauf que son nom n’apparaît plus.
Contexte 4:
Une amie supervise une stagiaire. Cette dernière est toute fière de présenter à sa superviseure le matériel qu’elle a préparé pour son stage. Elle a créé une unité d’apprentissage. La superviseure tourne les pages et se rend compte qu’il s’agit en fait de photocopies du cahier d’exercices qu’elle a elle-même écrit pour une maison d’édition et qui est marqué de la mention “ne pas reproduire”.
Toutes les quatre nous avons eu le même réflexe: questionner, informer et passer à autre chose. Nous continuerons toutes de partager parce que les bénéfices dépassent largement les inconvénients. On se dit toutes: s’il y a un élève quelque part à qui ce matériel a été utile alors le partage en a valu la peine. Mais, tu sais, toi dans ta classe, il y a quelques principes de base que tu peux utiliser pour que le partage continue et que les gens généreux le demeurent. Je te le dis, parce que contrairement à nous quatre, certains enseignants arrêtent de partager ou ne partagent pas de peur qu’une situation similaire ne leur arrive.
L’Étiquette du partage
1- IL Y A UNE SOURCE
Si ce qui t’est partagé comporte une source, garde-la. C’est quoi de garder sur le document le nom de la personne qui te l’a partagé? Pas grand chose! Tu l’as reçu de quelqu’un et tu veux le partager avec d’autres? Demande la permission. Moi, personnellement, j’écris souvent sur mes documents: “Vous avez toujours la permission de partager.” Sans cette mention, un petit courriel ou un coucou sur les réseaux sociaux fait aussi le travail.
2- TU VEUX MODIFIER LE CONTENU
Le projet t’intéresse et tu souhaites y faire des modifications? Idéalement, tu demandes la permission à l’auteur. Garde le nom de l’auteur original et contextualise les modifications: “modifié pour l’école XYZ par Mme M. à partir du projet original de Mme S.”
3- TU VEUX PARTAGER TON CONTENU MODIFIÉ
Demande à l’auteur. Demande-lui si il/elle veut le contenu modifié en retour. Voici un exemple: “Bonjour, votre projet m’intéresse beaucoup et j’ai créé une nouvelle tâche finale, j’aurais aimé la partager avec mes collègues à l’université. Je vous en partage ici une copie.”
4- IL N’Y A PAS DE SOURCE
Si tu connais la personne qui l’a créé, incite-la à ajouter son nom au bas du document, ça rendra possible tous les autres cas de figure cités plus haut. Si tu ne sais pas d’où ça vient et que tu as un peu de temps devant toi, tu peux toujours chercher par le biais des réseaux sociaux. “J’ai reçu d’une amie une SAÉ sur le thème de la poutine pour le 3e cycle du primaire, est-ce quelqu’un en connaîtrait l’auteur original?”. Tu n’as toujours pas le nom de la personne, voici une suggestion: indiquer “ Vous êtes l’auteur? Mes élèves vous remercient! Écrivez-moi pour qu’on ajoute votre nom sur ce document.”
5- PARTAGE EN RETOUR
Un projet, un document, une infographie ou une affiche n’ont pas besoin d’être extraordinaires pour être utiles à d’autres. Partage, tu recevras en échange des commentaires constructifs et la satisfaction de savoir que d’autres élèves, ailleurs dans la province, bénéficieront de ton temps et de ton savoir-faire sans que cela ne te demande davantage d’énergie ou de ressources.
6- DIS MERCI
On ne partage pas en ayant en tête tous les “mercis” qu’on recevra ou pas, mais je peux te garantir que ça fait du bien, même si c’est le 50e merci, il fait encore autant plaisir.
Pour plus d’information:
Nos amis du CSSMI ont une super section sur leur site web avec des ressources gratuites et de l’information organisée par type d’oeuvre.
Il y a ensuite COPIBEC qui gère les droits d’auteur au Québec et qui peut guider vos choix.